L'Alphabet des sables
Quand je marchais, petit, sur les dunes obliques
D'un rivage bombé aux courbes symétriques
Et que les remous blancs d'une marée femelle
Venaient parer ce bord de milliers de dentelles,
De grands oiseaux, parfois, en prenant leur envol
Jetaient dans le matin quelque absconse parole ;
Et je leur répondais dans mon langage informe
Mêlant ma frêle voix à ce fracas énorme.
On voyait se dresser tout le long de la plage
Des murailles au pied de châteaux forts sans âge,
Des cairns de galets, de tortueux tunnels
Qui courraient sous un flot de varech arc-en-ciel ;
Et perdu au milieu de ces contours dorés,
Je m'enivrais béat d'un courant d’air iodé.
Gris de contentement, les phonèmes épars
S'entrechoquaient, mêlés en un rythme barbare.
Aujourd'hui que, grandi, je foule de nouveau
Ce manchon jaunissant qui brille au bord de l'eau,
Ce ne sont plus les flots dont j'écarte les draps,
Et non plus les oiseaux dont j'écoute la voix.
Du creux des vallons blancs montent des cris d'amantes
Dont je parcours le corps de ma langue brûlante ;
Et leur souffle tombant d'une bouche enivrée
Épelle lentement les grains de l'alphabet.
Et que les remous blancs d'une marée femelle
Venaient parer ce bord de milliers de dentelles,
De grands oiseaux, parfois, en prenant leur envol
Jetaient dans le matin quelque absconse parole ;
Et je leur répondais dans mon langage informe
Mêlant ma frêle voix à ce fracas énorme.
On voyait se dresser tout le long de la plage
Des murailles au pied de châteaux forts sans âge,
Des cairns de galets, de tortueux tunnels
Qui courraient sous un flot de varech arc-en-ciel ;
Et perdu au milieu de ces contours dorés,
Je m'enivrais béat d'un courant d’air iodé.
Gris de contentement, les phonèmes épars
S'entrechoquaient, mêlés en un rythme barbare.
Aujourd'hui que, grandi, je foule de nouveau
Ce manchon jaunissant qui brille au bord de l'eau,
Ce ne sont plus les flots dont j'écarte les draps,
Et non plus les oiseaux dont j'écoute la voix.
Du creux des vallons blancs montent des cris d'amantes
Dont je parcours le corps de ma langue brûlante ;
Et leur souffle tombant d'une bouche enivrée
Épelle lentement les grains de l'alphabet.